Location saisonnière et activités illicites : Nouveau fléau ?
La crise sanitaire des deux dernières années a profondément marqué le monde du tourisme : les confinements successifs et les fermetures des hôtels, bars et discothèques pendant de longs mois, ont favorisé le déplacement de certaines activités illicites sur le marché des locations de courte durée…
Ainsi, les propriétaires doivent plus que jamais rester vigilants et aiguiser leur sixième sens pour débusquer les éventuels locataires de ce type.
Sans tomber dans le dramatisme, rappelons que ces agissements de certains locataires restent très rares mais qu’il vaut mieux être informé pour s’en prémunir.
Sommaire
- Activités illicites, de quoi parle-t-on ?
- Activités illicites, les moyens pour agir
- 1) Echangez avec vos futurs locataires
- 2) Sécurisez la relation avec un contrat de location
- 3) Rédigez un règlement intérieur de votre logement
- 4) Exigez une attestation d’assurance Villégiature
- 5) Signalez les comportements douteux, faites remplir une fiche de police aux étrangers
- 6) Augmentez votre tarif de location, la durée locative et l’âge minimum pour pouvoir réserver
- 7) Comptez sur une personne de confiance sur place
- 8) Installez une vidéosurveillance ou un capteur de bruits
- 9) Sécurisez votre connexion internet
- Conclusion
Activités illicites, de quoi parle-t-on ?
Juridiquement, est considérée comme activité illicite “celle qui est contraire à l’ordre public, qui ne respecte pas la loi”.
En matière de location de logements, une activité illicite sera, notamment :
- La sous-location non déclarée et acceptée par le bailleur,
- La communication de fausses informations (usurpation d’identité, mensonges sur le nombre de personnes hébergées, etc.),
- La vente de produits illicites : stupéfiants, drogues, trafic d’armes,
- La cyber-prostitution, le terrorisme,
- Les fêtes privées non déclarées et non acceptées par le bailleur,
- L’utilisation frauduleuse de la connexion internet mise à la disposition du locataire.
En droit, un propriétaire bailleur ou un copropriétaire bailleur est directement responsable des agissements fautifs de son locataire vis-à-vis des tiers ou de la copropriété dans le cas d’un immeuble en lots. S’il laisse les agissements se répéter sans agir, il augmente de facto le préjudice subi par les tiers ou la copropriété et sera suspecté d’être lui-même l’organisateur du trafic.
Activités illicites, les moyens pour agir
En dehors des éventuelles dégradations qui pourraient survenir dans votre hébergement locatif, vous êtes – en tant que propriétaire – en partie responsable devant la loi, si votre locataire exerce une activité illicite dans ce logement, d’autant plus si ce dernier a usurpé l’identité de quelqu’un d’autre ou demeure introuvable…
C’est dire s’il est important de pouvoir détecter en amont les signes qui pourraient conduire à ce genre de mésaventure !
1) Echangez avec vos futurs locataires
Nous ne le répéterons jamais assez : échanger avec ses futurs locataires avant la conclusion de la location est primordial !
Les attentes des locataires doivent être claires, la communication fluide et l’échange d’informations d’identité non forcé. Par exemple :
une personne qui ne connaît pas la ville d’implantation de votre location et demande si l’accès est discret, autonome et tranquille et souhaite également vous régler en espèces sans laisser de coordonnées d’identité doit susciter votre méfiance… (prostitution, drogue)
2) Sécurisez la relation avec un contrat de location
Le Code du Tourisme exige la conclusion d’un contrat écrit pour toute location saisonnière (article L.324-2). En dehors de l’aspect juridique de ce document, il peut vous permettre de vous prémunir de certains désagréments.
En effet, malgré votre vigilance au moment de la réservation, vos locataires peuvent se livrer à des activités illicites (car non-déclarées) comme la sous-location, l’exercice d’une activité professionnelle ou l’organisation de fêtes privées, l’utilisation frauduleuse de la connexion internet mise à leur disposition (achat en ligne, VOD, images à caractère pédopornographique). Il convient alors, pour faire cesser le trouble et ses conséquences parfois désastreuses sur le logement ou le voisinage, d’agir a posteriori.
Ainsi, dans votre contrat, nous vous conseillons d’insérer des clauses vous permettant d’agir comme :
- Rappeler que les activités illicites sont interdites dans votre logement (c’est logique, mais ça va mieux en le disant),
- Indiquer les coordonnées d’identité de la personne locataire (demander une copie d’un document officiel est un plus. S’il est volé, votre responsabilité devra être réduite à la bonne foi),
- Indiquer précisément le nombre de personnes hébergées pendant le séjour, avec répartition adultes/enfants (si ce nombre est dépassé en cas de fête privée par exemple, vous êtes dans votre droit d’agir),
- –Indiquer que vous pourrez visiter le logement en cours de séjour en présence du locataire et avec son accord (ainsi, un locataire récalcitrant n’aura pas le droit de s’y opposer).
Un groupe d’amis de la région souhaitant venir passer un week-end dans votre villa avec piscine et jardin peut cacher l’organisation d’une fête privée payante véhiculée sur les réseaux sociaux et ouverte à tous, gare aux dégradations et aux nuisances sur le voisinage !
3) Rédigez un règlement intérieur de votre logement
Généralement inséré dans le « manuel d’usage du logement », le règlement intérieur permet d’autoriser ou d’interdire certaines pratiques par vos locataires pendant leur séjour.
Ainsi, il peut être précisé dans ce règlement :
- Qu’il est interdit d’y fumer, vapoter, etc.
- Qu’il convient de protéger les fauteuils du salon avec un plaid s’il y a un animal de compagnie,
- Que les fêtes nocturnes et l’accueil de personnes étrangères à celles déclarées dans le contrat sont prohibées (à l’exception des membres de la famille du locataire hébergés à titre gratuit, c’est la loi !).
Bien entendu, il va de soi que le règlement intérieur doit avoir été porté à la connaissance de votre locataire : Au mieux, une signature en bas de page ou joint à l’état des lieux d’entrée, à tout le moins la trace d’un envoi électronique avant le séjour.
Le simple fait d’écrire ces clauses dans votre contrat ou votre règlement intérieur ne garantit pas que vos locataires s’y conformeront. Néanmoins, elles peuvent en dissuader certains et surtout, elles vous donnent le droit d’agir si vous constatez des manquements, y compris avec le renfort des forces de l’ordre. Elles vous permettent également de poursuivre vos locataires s’ils commettent des dégradations, car les règles ont été clairement exprimées au départ et validées par eux.
La loi prévoit qu’en cas d’activité ou d’acte illicite non conforme à la destination du bien mis en location, le propriétaire peut résilier le bail à tout moment. En matière de location de courte durée, il est toutefois difficile, en pratique, d’en arriver là, car le contrat de location a bien souvent pris fin avant…
4) Exigez une attestation d’assurance Villégiature
En tant que propriétaire, vous avez contracté une assurance dite « propriétaire non occupant » pour garantir les dommages que votre logement pourrait occasionner aux tiers. De la même façon, vous devez vous assurer que votre locataire est bien couvert pour les dommages qu’il pourrait causer à votre logement pendant son séjour [1].
Si votre locataire est déjà bénéficiaire d’une assurance Habitation pour son propre compte, ce qui est largement le cas, il lui suffit de demander une attestation Villégiature à son assureur. En France, le contrat multirisques Habitation couvre, sans cotisation supplémentaire, les séjours dans un logement temporaire pour une durée n’excédant pas 90 jours/an.
Ainsi, propriétaire et locataire sont couverts pendant le séjour.
Si un locataire refuse de produire cette attestation (les malfaiteurs rencontreront des difficultés à fournir un tel document), vous pouvez refuser la location ou résilier le bail conformément à la loi.
[1] Cette disposition est bien différente des garanties que promeuvent les plateformes de réservation en ligne, et surtout plus sécure : les assurances sont contractuelles et appliquent un barème, les plateformes agissent en conciliation et favorisent leurs clients vacanciers.
5) Signalez les comportements douteux, faites remplir une fiche de police aux étrangers
👉 En cas de réservation en direct, sollicitez les forces de l’ordre si vous ne pouvez agir vous-même.
👉 En cas de réservation via une plateforme OTA, type Airbnb ou HomeAway, en plus de déclaration aux forces de l’ordre, n’hésitez pas à signaler à la centrale de réservation le locataire indélicat : Récemment, Airbnb a été reconnu responsable des activités illicites de ses hôtes et condamné.
Enfin, en cas d’accueil d’étrangers (la majorité de ces trafics sont pilotés ou exécutés par des étrangers), la loi vous oblige à renseigner une fiche de police. Il va sans dire que les malfaiteurs refuseront de s’y plier…
6) Augmentez votre tarif de location, la durée locative et l’âge minimum pour pouvoir réserver
Certains lieux sont plus propices que d’autres pour les activités illicites. Un tarif de location plus élevé, ou une durée de location minimale peut rebuter certains indélicats.
Tout dépend de la typicité de votre logement : une petite maison à la campagne dans une région peu fréquentée attirera généralement moins les activités de trafic qu’un modeste souplex dans une ville moyenne. En augmentant le tarif à la nuitée de votre petit appartement, vous découragerez les trafiquants…
Enfin, une grande villa avec piscine en bord de mer sera susceptible d’attirer les organisateurs de fêtes privées… Pour contrer ce genre d’activités qui risquent de vite déborder, il est possible de demander à ce que le locataire occupant et signataire du contrat ait plus de 25 ou 30 ans. Mais attention, exiger un âge minimal pour louer doit répondre à un besoin de sécurisation pour le propriétaire. Pour ne pas tomber dans la discrimination, le plancher de l’âge doit être proportionnel à l’enjeu de la sécurisation de la location. Sur les OTA comme Airbnb ou Abritel, il est possible de demander au locataire de fournir sa pièce d’identité mais aussi d’exiger dans les conditions de réservation, un âge minimal. L’âge minimal requis doit être apprécié au regard de la typicité de la location (dangerosité ou complexité de certains équipements par exemple).
Pour les réservations faites en direct, il suffit de demander une copie de la pièce d’identité en cours de validité avec photo, pour pouvoir vérifier l’âge du locataire. Cela fait partie des documents que le propriétaire a le droit d’exiger de son locataire.
7) Comptez sur une personne de confiance sur place
Votre femme de ménage : Votre super héros !
Si vos locataires arrivent et partent sans aucune interaction avec vous, entourez-vous d’une personne de confiance qui, sur place, pourra assurer un accueil physique et une surveillance éventuelle en cours de séjour. A défaut, vous pouvez vous adjoindre les services d’une conciergerie, à condition que cette dernière soit effectivement bien présente auprès des logements dont elle a la charge.
8) Installez une vidéosurveillance ou un capteur de bruits
Tout en respectant les dispositions légales qui sont très sensibles pour ce type de dispositifs, vous pouvez équiper votre logement d’un système de vidéosurveillance pour garantir le respect de la destination de la location et conserver ainsi des preuves des agissements illicites.
Les capteurs de bruits (kits de station météo accessible à distance), quant à eux, permettent de vous alerter si le niveau sonore intérieur dépasse un certain seuil.
Là encore, pour vous conformer aux dispositions légales, vous devez informer vos locataires de l’installation de ce genre d’appareils, les disposer de manière à ne pas enfreindre leur intimité et leur usage ne doit pas être disproportionné par rapport à l’objectif recherché.
9) Sécurisez votre connexion internet
Si vous mettez à disposition de vos locataires votre connexion internet, méfiance !
En effet, vos locataires peuvent alors télécharger illégalement des contenus culturels, acheter de la VOD sur votre compte (et vous vous en apercevez à la fin du mois suivant, quand ils sont partis…), voire visionner des images à caractère pédopornographique…
En cas de contrôle des connexions, par exemple sur la protection de la création sur internet (loi Hadopi), c’est le propriétaire qui sera recherché et non le locataire indélicat.
👉 En effet, au regard de l’ARCOM (organisme public issu de la fusion du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel avec Hadopi au 1er janvier 2022), en mettant votre connexion à disposition, vous devenez alors un fournisseur d’accès internet et, à ce titre, vous êtes responsable de l’usage qui en est fait, même si vous prouvez par A+B que les téléchargements frauduleux ont été faits pendant le séjour de la famille X, contrat signé avec M. et Mme X à l’appui !
Le seul moyen de vous en prémunir et d’être tranquille vis-à-vis de la législation est de placer un portail sécurisé entre votre connexion et votre locataire.
Concrètement, plusieurs systèmes existent sur le marché, qui équipent déjà des chambres d’hôtes, des hôtels, etc. L’un des moyens consiste à faire appel à un prestataire qui prépare et configure pour vous ce genre d’équipement. Le locataire devra alors s’identifier pour surfer sur la toile, ses connexions seront tracées et conservées pendant 12 mois par le prestataire pour pouvoir répondre à toute demande de l’administration.
Cette solution comporte un coût matériel (environ 500-700€), puis une redevance mensuelle (moins de 15€). C’est le prix de la tranquillité et du « zéro risque”…
Conclusion
Vous l’aurez compris, les trafics en tout genre sont vieux comme le monde et si nous avions trouvé la recette pour les éradiquer, ça se saurait !
Aucune clause, aucun contrôle, aucun sixième sens ne saurait les éviter à 100%. Seule l’information partagée, la vigilance et le bon sens peuvent permettre de réduire leur propagation et leur impact sur notre activité.
Bonnes locations !
Dominique
au nom de l’équipe d’administration de LVP Direct.